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Hogwarts Legacy

La magie opère

S’il y a bien une licence qui manquait à l’appel ces dernières années dans le monde vidéoludique, c’est celle d’Harry Potter, un univers qui a désormais plus de vingt ans, mais qui a su traverser les époques et les générations. Alors que la série semblait définitivement enterrée sur le plan vidéoludique, Warner surprenait son monde en 2020 en dévoilant Hogwarts Legacy, premier RPG en monde ouvert dans l’univers des sorciers. Un titre aussi ambitieux qu’attendu au tournant par les fans. Et pour une première incursion dans le monde du triple A, le studio Avalanche tape en plein dans le mille.

L’histoire d’Hogwarts Legacy se déroule dans les années 1800, bien avant la période décrite dans les livres de J.K. Rowling. On y incarne un jeune sorcier qui intègre directement la cinquième année de la plus célèbre école de magie au monde. Notre héros semble disposer de capacités un peu spéciales, qui intéressent un gobelin du nom de Ranrock, dont les intentions ne sont pas très louables. Si les têtes d’affiche des films et livres manquent logiquement à l’appel vu l’époque, les développeurs ont pris soin de faire apparaître toute une galerie de personnages en lien avec Harry et sa bande: on retrouve donc des membres de la famille Weasley, ou encore Nigellus Black, en lien avec un certain Sirius.
Le scénario d’Hogwarts Legacy ne fait pas dans la grande originalité, mais il a le mérite de tenir la route et nous donne envie d’en savoir plus jusqu’à voir l’écran de fin s’afficher.

Une magie qui opère d'emblée

Là où le jeu excelle, c’est dans la retranscription du monde des sorciers. Poudlard bénéficie bien entendu d’une attention toute particulière: absolument tous les lieux, toutes les pièces du château sont reconnaissables et fourmillent de mille détails. On se surprend vite à déambuler dans les couloirs du château, tendant l’oreille pour entendre quelques conversations, entre deux recherches de secrets bien dissimulés. L’école des sorciers est aussi grande que vivante, et justifierait presque l’achat à elle seule pour les fans de la saga. Les célèbres cours de potions, de défense contre les forces du mal ou de botanique sont de la partie, même si on aurait aimé une véritable gestion de l’emploi du temps à la manière d'un Bully (le GTA en milieu scolaire de Rockstar Games). Ici, les cours ne sont que ponctuels et servent essentiellement à débloquer un sort ou à faire avancer le scénario. L’apprentissage des sorts se fait le plus souvent par un système de “devoirs”, à savoir des préalables requis par les différents professeurs afin qu’ils nous enseignent un sortilège (par exemple, planter et récolter des graines de telle plante): un système intelligent, qui évite le sentiment de répétitivité. La dimension sociale est également réduite au minimum, autant dans sa propre maison (on peut choisir en début de partie entre Serpentard, Gryffondor, Serdaigle ou Poufsouffle) que dans les relations avec les autres étudiants: les salles communes de chaque maison, si elles sont extrêmement bien réalisées, n’apportent rien dans le gameplay. C’est un peu dommage, compte tenu de l’univers et du scénario (on incarne tout de même un nouvel élève qui intègre directement la cinquième année et qui doit donc apprendre tout le fonctionnement de l’école), qui se prêtait bien à un système de relations plus poussé. Les règles et les horaires de cours semblent très souples dans le Poudlard d’Hogwarts Legacy, et le message adressé au joueur est clair: bienvenue au parc d'attractions, vous avez différents manèges, amusez-vous comme bon vous semble.

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Côté réalisation, c’est un sans-faute, ou presque. Des musiques aux décors, en passant par les doublages, tout transpire l’univers Harry Potter. Le souci du détail est poussé au maximum, et on constate avec joie que les développeurs ont su saisir l’essence même de saga, ce qui en fait sa magie. Deux modes d’affichage sont disponibles, à savoir performances et fidélité, et le choix du premier implique forcément une perte graphique, notamment en ce qui concerne les éclairages et quelques détails. Le 60 images par seconde est par contre parfaitement tenu dans ce cas.

Un monde ouvert inégal, mais qui pousse à l'exploration

Mais le monde d’Hogwarts Legacy ne se limite pas aux murs du château de Poudlard. Avalanche Studio s’est permis le luxe de nous offrir un monde ouvert, à parcourir librement. Si la carte n’est pas immense comparée à d’autres titres du genre, elle reste suffisamment étoffée pour nous offrir des lieux assez variés. On retrouve donc l'incontournable bourgade de Pré-Au-Lard, sorte de HUB où l’on peut acheter du matériel comme de l’équipement, des matériaux nécessaires à la fabrication de potions ou encore des balais. Mais également des forêts, grottes ou hameaux à découvrir: la célèbre forêt interdite est de la partie, et permet de glaner de l’XP massivement en début de partie. Du côté des balais, il faut attendre quelques heures de jeu avant de pouvoir acquérir son premier balai et parcourir la carte depuis les cieux. Parler de “game changer” est peut-être un peu fort, mais dès lors que l’on débloque le balai, l’exploration s’en trouve clairement renouvelée, et on profite de la verticalité du level design. On trouve d’ailleurs des plateformes d'atterrissage un peu partout, dont le défi est de toutes les trouver. Pour les plus pressés (ou fainéants), un système de voyage rapide est disponible via les flamme de cheminettes. Dès qu’on découvre une nouvelle flamme, le voyage rapide vers ce lieu est disponible à partir de n’importe quel coin de la carte.

Globalement, le monde ouvert pousse vraiment à l’exploration: on trouve des endroits très réussis et très jolis, et d’autres un peu vides. La carte du monde aurait pu être amputée d’un quart sans souci, même si on comprend la volonté d’Avalanche de donner une impression de monde vaste, qui ne se limite pas à Poudlard. Les activités proposées sont très variées, et on est agréablement surpris de découvrir de nouveaux types d’énigmes même après une dizaine d’heures de jeu. Cela va de la capture d’animaux sauvages (pour les protéger de braconniers, paraît-il ?), à l’exploration de grottes, en passant par les “défis de Merlin”. Disons-le franchement, ces défis, disséminés aux quatre coins de la carte, ne sont pas franchement passionnants. La plupart du temps, il s’agit de trouver et de détruire des vasques, ou d’allumer des feux. Il faut cependant en passer par là pour agrandir notre inventaire, et bon sang que celui-ci est limité. Le jeu devient rapidement la foire au loot (pièces d’or ou d’équipement trouvés sur les ennemis ou dans les coffres), et on se retrouve rapidement en manque de place. On fait donc quelques défis, histoire d'obtenir des upgrades, puis on finit par les laisser de côté. Seuls les chasseurs de trophées ou de succès les plus acharnés essayeront de tous les compléter.

Des combats beaucoup plus fins qu'il n'y paraît

La très bonne surprise du jeu concerne le système de combat, notre protagoniste devant régulièrement user de sa baguette magique pour se défaire d’ennemis divers et variés. Il faut avouer qu’on avait du mal à imaginer quelque chose de profond et intéressant en voyant les premiers trailers. Et pourtant, après quelques heures de jeu, nos doutes se sont peu à peu estompés. Sur le papier, on est face à du classique: une gâchette pour l’attaque de base, une esquive à base de roulade, et un contre à déclencher dans le bon timing pour étourdir l’ennemi.

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Et petit à petit, à mesure que l’on débloque les différents sorts, les combats gagnent en profondeur pour devenir franchement plaisants. Il s’agit alors de trouver la faiblesse de l’ennemi, et d’en profiter pour enchaîner les sorts de façon à maximiser les dégâts. Lorsqu’on a réalisé un combo suffisamment long, notre jauge de spécial se remplit, nous permettant de déclencher une attaque dévastatrice. Les ennemis les plus légers ne résistent pas longtemps face à un enchaînement de lévitation, d’attaques basiques suivi d’un Descendo pour les fracasser face contre terre. Quant aux gobelins, il faudra utiliser ses sorts d’explosion ou d’incendie pour ouvrir leur garde. Pour peu qu’on s’investisse un minimum et qu’on se prenne au jeu, les affrontements sont donc suffisamment variés pour y prendre un réel plaisir. Les effets des sorts et d'explosions, très réussis, viennent aussi ajouter du dynamisme aux affrontements. Les Sam Fisher en herbe peuvent toujours choisir l’option infiltration à l’aide du sort de dissimulation, mais celle-ci ne présente pas grand intérêt ludique, et la plupart du temps, on préfère un bon combat de sorts en bonne et due forme.

Light RPG

L’aspect RPG du jeu, en revanche, ne convainc pas totalement. D’abord, l’équipement looté sur les ennemis ou dans les coffres, s’il est très réussi esthétiquement et colle parfaitement à l’esprit de la série, ne montre qu’une utilité toute relative passé un certain cap. Bien sûr, lors des premiers niveaux, on doit régulièrement en changer, ne serait-ce que pour augmenter sa défense ou son attaque; mais une fois arrivé au niveau vingt environ, les gants, tenues et autres écharpes légendaires pleuvent, et il n’est plus nécessaire d’en changer. De plus, cela surcharge l’inventaire et nous oblige à effectuer des allers-retours réguliers à Pré-au-Lard pour le vendre, cassant le rythme du jeu.

Ensuite, changer son set en fonction des ennemis ne se révèle nécessaire que dans les niveaux de difficulté les plus élevés. Jamais le mode normal ne vous imposera de changer votre équipement, d’autant que le bestiaire n’est pas particulièrement varié (gobelins, mages noirs, araignées ou trolls constituent la majorité des adversaires). Un mot d’ailleurs sur l’ergonomie des menus, qui n’est pas des plus pratiques: on ne le répétera jamais assez, le curseur est une mauvaise idée sur console. Ici, toutes les actions effectuées dans les menus passent par ce satané curseur, y compris le changement d’équipement, qui se révèle vite fastidieux. Dans la même veine, la carte en 3D paraissait être une bonne idée sur le papier, mais elle se révèle très brouillonne en pratique. Chaque montée en niveau nous offre des points de talents à dépenser dans différentes catégories comme la magie noire, les sorts ou encore le coeur (pouvoir mapper une deuxième palette de sort sur les boutons de la manette est on ne peut plus agréable).

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Ce qui motive l’exploration dans Hogwarts Legacy, ce n’est pas seulement l’équipement, mais surtout la collection. On enchaîne donc les sorts de Revelio, pour être sûr de faire apparaître tout le loot disponible en jaune fluo, et ne rien laisser derrière nous. À tel point que cela en devient presque pavlovien. L’onglet Collections du menu nous permet de voir la progression de chaque jauge, et autant vous dire que pour faire le 100 %, il faut compter une centaine d’heures, au moins. Pour explorer, progresser et collecter, il faut régulièrement résoudre des puzzles et autres énigmes, qui reposent la plupart du temps sur la logique et les effets des différents sorts que l’on apprend pour manipuler, déplacer ou détruire des objets. On n'atteint pas le niveau d’excellence ou de gestion de la physique d’un Breath of The Wild, mais c’est toujours un plaisir de tomber sur une de ces énigmes au détour d’une grotte. Certains puzzles sont bien retors, et la petite voix intérieure de notre personnage nous donnant des indices est parfois la bienvenue, même si elle a parfois tendance à se déclencher un peu vite, nous laissant à peine le temps de réfléchir.

Au-delà de la quête principale, on trouve des quêtes annexes, allant de la plus oubliable à la plus intéressante. Certaines quêtes se permettent même le luxe d’offrir une narration supérieure au fil rouge, notamment celle d’un camarade nommé Sebastian dont la sœur souffre d’une malédiction à priori incurable (on n'en dira pas plus par souci de ne pas spoiler). Le ton est toujours assez léger, un peu “Disney” sur les bords, sauf quand il s’agit de s’aventurer dans l’apprentissage des sortilèges impardonnables (oui, on peut apprendre le fameux Avada Kedavra). Cependant, le jeu a le bon goût de ne jamais verser dans la niaiserie. On aurait peut-être aimé une mise en scène un peu plus dynamique, les dialogues à base de champ/contre-champ pouvant être un peu longuets par moment. Des dialogues qui laissent parfois la place à de petits choix à faire, même si on aurait aimé pouvoir jouer un personnage au caractère et à la personnalité radicalement différents en fonction des maisons et dont les choix influencent un peu plus la trame principale, ce qui n’est pas vraiment le cas. En clair, à quelques variations près, toutes les parties d’Hogwarts Legacy devraient se ressembler.

Verdict

C’est peu dire qu’Hogwarts Legacy était attendu au tournant. Par les fans certes, mais également par une bonne partie des joueurs adeptes d’expérience solo en monde ouvert. Et s’il ne révolutionne rien, le premier gros jeu du studio Avalanche est une franche réussite. Certes, aec son monde ouvert, ses points d’intérêts et ses mécaniques de “light RPG”, il ne propose pour ainsi dire rien que d’autres n’aient jamais fait avant lui. Mais voilà, Avalanche avait dans sa main une mine d’or avec l’univers d’Harry Potter. Une mine qu’ils ont parfaitement su exploiter. La seule chose qu’Hogwarts Legacy fait de plus, finalement, c’est saisir l’essence même de l’univers de J.K. Rowling, et faire opérer la magie manette en main. Et ça fait toute la différence.

Hogwarts Legacy

Critique rédigée par Ataru
Publié le 20/02/2023 à 10:31

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