Le vide spatial, les monstres terrifiants et la barre de vie dans le dos, tout ça nous rappelle étrangement des souvenirs. Près de quinze ans après la sortie de Dead Space, qui reste un monument du survival horror (un remake est d’ailleurs en préparation pour l’année prochaine), son créateur Glen Schofield revient aux affaires avec The Callisto Protocol. Si le titre va puiser ses inspirations chez son grand frère, il parvient tout de même à se démarquer et à trouver sa propre identité, non sans quelques petits errements, vite éclipsés par la qualité de l’ensemble.
Première grande différence avec son illustre aîné, The Callisto Protocol n’est pas vraiment effrayant. Bien sûr, les inévitables jump scares sont de la partie, histoire de nous rappeler qu’on est tout de même entouré de monstres et livré à nous-mêmes dans une prison spatiale. Mais l’ambiance anxiogène des deux premiers Dead Space (il y a eu un Dead Space 3 ?) est ici remplacée par une avalanche de gore. Démembrements en tout genre, giclées d’hémoglobine qui raviraient les établissements français du don du sang, toute la panoplie y passe. Un parti-pris artistique respectable, même si l’on ne peut s’empêcher de penser que The Callisto Protocol fait parfois “du gore pour faire du gore”.
Assez “couloir” dans l’esprit, The Callisto Protocol sonne comme une bouffée d’air frais pour les amateurs d’expériences courtes mais intenses, et ceux qui commencent à se lasser de cette mode des mondes ouverts parfois vides de sens. Le scénario et l’écriture sont à l’avenant: simples mais efficaces. On incarne Jacob Lee, échoué sur une prison qui semble réserver bien des mauvaises surprises, et qui va devoir charbonner pour s’en tirer vivant. Pas de gros rebondissements au programme, mais on suit la trame sans déplaisir.
Parlons un peu des combats: si le jeu se veut axé survival-horror, on a régulièrement maille à partir avec des créatures diverses, mais pas toujours très variées. Bien que les monstres soient assez réussis, le bestiaire ne se renouvelle que très peu au cours de la douzaine d’heures nécessaires pour voir le bout du jeu. Les phases de transition dans la prison de Black Iron (où se déroule le jeu) se veulent assez posées, mais le titre nous jette régulièrement des hordes d’ennemis dans la tronche, avec la dose d’action frénétique qui l’accompagne. Pour terrasser ces ennemis et se frayer un chemin vers la sortie, plusieurs approches sont possibles. Le corps-à-corps tout d’abord, avec notre matraque électrique, mais aussi les attaques à distance avec notre gant magique qui permet de saisir des objets à distance façon Luke Skywalker. Les amateurs de pétoires seront ravis de trouver toute une panoplie d'armes à feu pour compléter notre arsenal de prisonnier survivant. Pour les débloquer, il faut d’abord looter les caisses, cadavres et autres étagères de chaque pièce afin d’en trouver les plans, puis utiliser l’une des nombreuses imprimantes 3D disposées sur notre chemin. Le tout moyennant finance, en l'occurrence les “crédits Callisto”, la monnaie du jeu. L’aspect loot peut parfois se révéler pénible, car on a parfois l’impression de passer au peigne fin chaque recoin d’une pièce sans vraiment profiter de son ambiance.
La plupart du temps, on commence par donner quelques coups de matraques avant de finir par un headshot bien placé. L’ensemble fonctionne plutôt bien, et on démembre ses ennemis sans déplaisir. Les sensations sont bien présentes, et on ressent bien la lourdeur et la violence des coups portés. En un mot, c’est poétique comme du God of War. Le système d’esquive se montre aussi simple qu’efficace. D’un mouvement de stick gauche, on esquive les coups portés d’un petit coup de buste vers la droite ou vers la gauche, tel un Mohammed Ali des grands soirs. Lors de certaines séquences, on peut utiliser les éléments du décors pour venir à bout des ennemis, ce qui apporte un peu de variété, même si on aurait aimé plus d'interactions avec les éléments comme le feu. Seule l’absence de système de verrouillage se révèle parfois problématique lorsqu’on affronte plusieurs ennemis, donnant lieu à des ratés parfois mortels.
Heureusement, les injecteurs de vie sont disséminés ça et là pour nous permettre de recharger notre jauge de vie, située non plus sur notre dos comme dans Dead Space, mais dans notre nuque. Le jeu parvient facilement à trouver le bon équilibre entre phases d’exploration plus calmes et combats, même si l’on finit forcément par ressentir une certaine routine dans la boucle de gameplay proposée. Grosso modo, les énigmes se résument à trouver des fusibles pour alimenter des portes électriques afin de les ouvrir. Après tout, nous sommes en prison… Reste que le format très ramassé du jeu, sans quêtes annexes ou autres à côtés pas toujours pertinents convient très bien au game design proposé.
Techniquement, tout n’est pas parfait, mais comme souvent, la direction artistique vient sublimer la technique pure. Si l’on a le choix entre les traditionnels modes performances et qualité, les chutes de framerate se ressentent à certains moments, même en mode performance. Aussi, certains éléments du décor comme le feu semblent tourner dans une résolution inférieure au reste. Rien de gênant, mais comparé au reste, globalement impeccable, cela a de quoi faire un peu tiquer. La modélisation des décors et des personnages est impeccable, mais là où le jeu excelle vraiment, c’est dans sa gestion de la lumière et des particules. Passer dans une pièce obscure, à travers laquelle on aperçoit uniquement un peu de fumée à travers un petit filet de lumière fait toujours son effet. Le sound design apporte encore une touche d’immersion supplémentaire, notamment sur PlayStation 5 avec l'utilisation du haut-parleur de la manette pour simuler les conversations audio.
Attendu au tournant par tous les fans de Dead Space et de survival horror, The Callisto Protocol se montre à la hauteur des attentes. Le titre de Glen Schofield s’avère être très réussi dans son genre. À savoir un jeu à ambiance, dirigiste mais suffisamment ramassé pour nous tenir en haleine et nous donner sans cesse envie d’en voir plus, jusqu’à trouver enfin la sortie de cette satanée prison spatiale.
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